jeudi 31 décembre 2015

De quoi faut-il se réjouir? #4

qui a peur des femmes photographes?- Musée de l'Orangerie

De l'année bissextile qui arrive.
Nous aurons un jour de plus pour profiter de la vie.
Nous aurons un jour de plus pour

  • découvrir un nouveau vin qui ravira nos papilles. M de Manon Domaine de Trebaudon en rouge et un Viogner vendanges d'Octobre d'Ardèche en blanc (enfin doré quoi)
  • aller au cinéma, se faire raconter une histoire, s'éclairer de la vie des Autres. The Big short qui m'a démoralisé sur l'Ethique et le Système : mais comment en sort-on?
  • partager un bon moment. Un soir de juillet entre melon et pastèque, une soirée de tout de rien, de fous rires, ou après un anniversaire d'enfants un apéro impromptu qui dure jusque tard dans la nuit
  • offrir un livre : Grand Loup et Petit Loup d'Olivier Le Tallec à un homme de 60 ans dirige un groupe de 11000 personnes. Se voir en offrir un : Delphine de Vigan (une découverte pour moi) D'après une histoire vraie
  • rester à la maison, au coin du feu en hiver ou sur un coin de terrasse en été. Seul, à deux, à plusieurs, avec des copains, un thé ou du vin.
  • voyager, pour se former même si on n'est plus jeune et lire les récits de Sylvain Tesson, parce qu'on peut alors cumuler le point précédent et celui -à (voyager en restant au coin du feu, pour ceux qui ne suivent pas)
  • voir des belles choses pour se nourrir l'esprit, se laver les yeux et se réconcilier avec le reste 
  • s'endormir en se disant que demain est un autre jour.
Je vais m'endormir ce soir en me disant que demain est une autre année.

mercredi 30 décembre 2015

De quoi faut-il se réjouir? #3

Du service public. 
De France Inter en particulier. 
De ses programmes estivaux, pour être précise.
Il y a eu tout l'été une émission intitulée "ça va pas la tête". 
Disponible en podcast. 
Et bien ça va mieux après en avoir écouté quelques unes.
Que comme un fait exprès je n'ai écouté qu'après m'être lamentée sur ce que qui pouvait me réjouir.

Je conseillerai donc "Célébrons la joie avec ce bon vieux Spinoza" et "Dites un grand oui à la vie avec ce bon vieux Nietzsche".
Où on apprend que le joie n'est pas la béatitude, mais une aptitude de faire avec ce qui nous arrive. 
De ne pas lutter contre les éléments, mais de s'en servir. 
D'accueillir la contradiction, de cesser de vouloir être cohérent.
Et de s'en réjouir.
Voilà c'est dit.
A bon entendeur, salut!

mardi 29 décembre 2015

Si loin, si proche

La maison de mon enfance

Un ami d'enfance, en vacances dans la région de mon enfance à moi (qui n'est pas la sienne) se promène dans un livre d'aquarelles sur le Champsaur (comment ça vous ne connaissez pas? Je vous ferai un cours de champsaurin, un jour).
Je suis à Paris, lui à 700 km de là et quelques 1000 mètres d'altitude plus élevée, il croise dans ses pérégrinations picturales la maison de mes parents.
J'en suis partie la veille après les fêtes de Noêl, et elle me rattrape par un envoi électronique.
Avec les commentaires qui vont avec.

Comme quoi, l'enfance ne nous quitte jamais tout a fait.
Même quand on pense l'avoir laissée (ou abandonnée) derrière soi, elle nous rattrape.
Nos amis sont là pour ça.
C'est toute la gratitude qu'on leur doit.

De quoi faut-il se réjouir? #2

Vue de Gentilly - novembre 2015
Pas de quoi se réjouir non plus
De notre carnet de commandes au Cabinet?
Je n'en suis pas si sûre.
Ni de mon nouveau statut d'associé, qui a tant réjoui mon Compte en Banque.
Mais pas vraiment mon Equilibre. Ni ma Santé Mentale.
Bien que je ne sois pas certaine que les deux soient liés.

On devrait se réjouir d'avoir beaucoup de travail.
Que nos clients nous redemandent.
Que nous fidélisions les gens.
Que nous assurions notre croissance.
Mais pour faire quoi?
Changer le monde? Changer la société? Changer l'Entreprise?
Et chez nous, ça se passe comment au 5 rue Jules Vallès?
Mes collègues sont épuisés. Ca les rend bougons. Ca les rend grognons.
Ca crée de l'individualisme. Du repli sur soi.
On ne va pas jusqu'à voter à droite, ça reste un nid de gauchos.
Mais on s'aide moins, on se parle à peine, on s'évite parfois, on s'envoie balader aussi.
Et ils tombent malades. Au moment où ils doivent rendre un doc pour un client. Et ça retombe sur ceux qui sont encore là. Pas encore tombés au combat. Mais aussi au bord du gouffre.
"Ils ne mourraient pas tous, mais tous étaient touchés", disait-il.
C'est comme ça chez nous. En cette fin d'année.
Je n'ai pas signé pour ça. Je ne veux pas être complice de ça. Je ne suis pas patron pour ça.

Je ne veux plus de retour en train le soir tard, avec ma collègue au bord du collapse qui n'arrive plus à travailler. Alors je prends la plume, le clavier plutôt, à sa place. Et c'est moi le lendemain, qui suit borderline dans mes attendus.
Je ne veux plus de regards hagards dans les couloirs, entre deux notes, entre deux portes.
Je ne veux plus d'apnée, de mots suspendus, de gestes perdus dans l'openspace en pleine semaine.
Je ne veux plus de coups de fils de gens désespérés le vendredi soir qui m'expliquent que leur situation à eux est plus compliquée, qu'il faut que je les aide.
Je ne veux plus entendre les injures et les insultes de mes collègues sur les clients, signe de débordement, signe d'agacement, signe de trop plein, de manque de recul, de manque de respect.
Je ne veux plus dormir tout le week-end pour récupérer de la semaine.
Je ne veux plus vivre au dessus de mes moyens relationnels et annuler les diners avec de copains parce que je suis incapable d'être en contact.
Je ne veux plus d'un rhume qui dure un mois, qui me laisse aphone et me fragilise sur la période.

Je n'ai pas signé pour ça.

Que 2016 m'aide à trouver la volonté de puissance (comme dirait Nietzche, cf. billet suivant!).
Et comme je suis avant tout une existentialiste, en 2016 je vais oeuvrer pour y arriver.
Je ne veux pas écrire le même billet dans un an.


samedi 26 décembre 2015

De quoi faut-il se réjouir? #1

"pas ici tout de même" - Jérôme Delay

Je termine l'année dans une forme relative.
J'ai trouvé l'année 2015 difficile. La mienne, celle des autres, la nôtre, celle que l'on mène en France, celle que l'on voit dans le monde.
Par instants, qui sont malheureusement plus en plus nombreux, je perds foi en l'Humanité.
Et je ne sais plus quoi penser.
Ce qui est pire. Pour moi tout du moins.

De quoi dois-je me réjouir?
De quoi puis-je me réjouir?

Pas de ce qui s'est passé dans notre quartier, pas ce que qui est passé près de la Belle Equipe, pas de ce qui a touché mes collègues, celui que j'adore et celui que j'aime le moins - comme un fait exprès. Ils se sont retrouvés liés dans cette histoire d'attentat. Et les deux m'ont touchée.
Il y a celui qui un vendredi soir buvait des coups à la Belle Equipe, c'est à deux pas du bureau, et le vendredi soir, c'est facilement un coin pour une bière "after work". Un peu après 20h30, il s'est rappelé qu'un autre de nos collègues s'était fait piquer, un soir de "pub crawl", son sac de boulot avec son Mac (oui, j'ai aussi de iCollègues, après mon iMari) . Comme il était déjà au peu entamé par quelques bières, il s'est dit dans un moment de lucidité que ce serait une bonne idée de remonter au bureau poser son sac vue la suite de la soirée qui s'annonçait.
Eclair de Génie.
Eclair de Clairvoyance.
Eclair de je-ne-sais-quoi.
Toujours est-il qu'il est revenu au 5 rue Jules Vallès, au 2ème étage avec sa compagne et le pote qui l'accompagnait.
Quand il est redescendu, il a enjambé des gens allongés dans la rue. Morts.
Il a contourné des flaques de sang. En France, dans notre quartier.
Il a été dirigé par des flics et des militaires en dehors de la zone. Entouré de gens tétanisés. En silence.
Il a hélé des taxis qui ne s'arrêtaient pas, parce qu'ils avaient pour consigne de ne pas prendre aucun client à bord.
Il a marché comme des milliers d'autres pendant des heures, sans oser prendre le métro, pour regagner son domicile. En silence. Sans comprendre.
Il s'est dit que ce n'était pas son Heure.
Et il y a mon autre collègue. Le Jeune.
Celui dont le père a le même boulot que ma soeur.
Celui qui  ressemble tant à mes fils.
Celui qui est né quand je rencontrais mon premier amant.
Celui qui me propose une cigarette quand il veut me parler.
Celui qui me prend dans ses bras sans que je ne dise rien.
Celui qui  avec qui je suis liée par des fils invisibles.
Celui qui était ce soir là au Carillon et qui en a eu marre et a changé de bar un peu avant 21h.
Comme l'autre. Ce n'était pas son jour.
Comme l'autre, il a passé une nuit d'enfer.
Jusqu'à une heure avancée de la nuit, retranché dans un bar de la rue Oberkampf. Dans un bar qui avait baissé son rideau avec ses clients à l'intérieur, jusqu'à ce que la Police leur donne l'autorisation de rouvrir et demande aux gens de rentrer chez eux. Mais le quartier est bouclé. Ces jeunes rentrent à pied, à 2 heures du matin à travers Paris. Du 11ème au 14ème, sous une avalanche de SMS qui demandent si "tout va bien".
Rien ne peut aller bien. Et pourtant nous sommes là.
Nous sommes là le lundi.
Et les jours suivants.
Nous sommes là quand il faut aller faire une minute de silence à la Belle Equipe.
Je suis là quand il faut lui tenir la main. Quand il retient ses larmes.
Je suis là. Mais je n'en mène pas large.
Je dormais ce soir là. Epuisée, ces derniers temps, je sors moins. Je me tiens peu au courant.
Je n'ai appris tout cela que le lendemain.
Mes premières pensées ont été pour le Jeune. Et quand j'ai allumé mon téléphone, le message rassurant était là.
Merci.







dimanche 6 décembre 2015

Je suis en voie d'extinction

Roanne - 28 octobre 2015, 9h du matin

"Les poèmes ont sans doute le pouvoir de sauver le monde, mais ceux qui les lisent sont si peu nombreux, et leur nombre va diminuant : ils sont une ethnie en voie d'extinction. On devrait d'ailleurs leur accorder le statut d'espèce protégée et il faudrait que l'UNESCO pense à les inscrire au patrimoine de l'humanité."
D'ailleurs les poissons n'ont pas de pieds - Jon Kalman Stefànsson


Et donc en voilà un :

Je ne l'ai pas encore dit à mon jardin -
De peur d'être conquise.
Je n'ai pas encore la force à présent
De l'annoncer à l'Abeille -

Je n'en dirai pas le nom dans la rie
Les boutiques me dévisageraient -
Que quelqu'un aussi timide - aussi ignorant
Ait l'aplomb de mourir.

Les collines ne doivent pas le savoir-
Où j'ai fait tant de randonnées -
Ni dire aux forêts amoureuses
Le jour où je 'mentirai -

Ni le chuchoter à table -
Ni par inadvertance, en passant
Suggérer qua l'intérieur de l'Enigme
Quelqu'un marchera aujourd'hui -

Emile Dickinson

dimanche 29 novembre 2015

Etreinte : who needs a hug?

Blanket - Craig Thompson
Juste avant

"Etreinte est sans doute le mot le plus beau de toute notre langue. Ouvrir ses bras pour toucher une autre personne, tracer un cercle autour d'elle, s'unir à elle l'espace d'un instant afin de constituer un seul être au sein des maelströms de la vie, sous un ciel ouvert d'où Dieu est peut être absent.
Nous avons tous, à un moment ou l'autre de notre vie, et parfois terriblement, besoin que quelqu'un nous prenne, besoin d'une étreinte à même de nous consoler, de libérer nos larmes ou de nous procurer un refuge quand quelque chose s'est brisé. Nous désirons qu'on nous étreigne simplement car nous sommes des hommes et parce que le coeur est un muscle fragile."

D'ailleurs les poissons n'ont pas de pieds - Jon Kalman Stefànsson

En ces temps troublés, le réflexe serait le repli. Le coeur est bien fragile, entamé par ceux qui sont y restés, ceux qui sont passés tout près, ceux qui ont enjambé ceux morts à terre. Le coeur est mis à mal quand tous les jours, on passe devant "la Belle Equipe", quand on lit sur toutes les vitrines le numéro vert du soutien psychologique, quand on voit les regards perdus de ceux qui se souviennent.
Reposons-nous, étreignons-nous, au moins par le regard.



vendredi 23 octobre 2015

Chroniques d'Edinburgh #3 : little differences


"But you know what the funniest thing about Europe is?
The little différences." *

L'Ecosse est-elle vraiment dans l'Europe? Ils restent des insulaires, passés à deux doigts de l'indépendance.
Anyway, les little differences c'est ce que j'apprécie :  

  • les roux sont pléthoriques, je me fonds dans la masse, mes enfants aussi
    La panoplie du fish and chips
  • les feux ne sont pas synchronisés : tout est au rouge à un moment, plus aucune voiture ne passe, c'est le tour des piétons
  • les cafés ferment vers 17h, la relève est prise par les pubs. On peut boire du vin dans les cafés, mais pas de café dans les pub. Il y a une heure où on arrête le café
  • au pays du thé, il est difficile de trouver une théière, à croire ils ont tous reçu la leur en héritage
  • tous les musées ont leur "café" et on y mange très bien, tout est frais et "homemade"
  • le vin est rangé par continent d'origine et le vin français n'a plus de place que les vins Oz ou Sudaf
  • les gens font la queue pour prendre le bus
  • quand nous essayons de réduire le millefeuille de notre administration territoriale (faut il supprimer l'échelle du département? de la région?) eux créent un parlement écossais
  • au pays du thé (encore) on en trouve qu'une seule sorte dans les rayons et pas de magasins de thé
  • après 17h
    au pays du thé (fin), il ne se boit qu'avec du lait, c'est leur façon à eux de soutenir leur agriculture
  • toutes les fenêtres sont à guillotine, alors que chez nous c'est interdit
  • on peut se faire servir un breakfast toute la journée, et ça constitue un vrai repas 
  • a contrario, à partir d'une certane heure les enfants ne sont plus admis dans les pubs (c'est plus ou moins concomitant avec l'heure du café, bien que les enfants ne boivent pas de café)



Le kitsch élevé au rang d'Art
Survivantes, pour les touristes.
    Ce sont des vacances "way of life" : faire ses courses, prendre ses habitudes au café du coin, devenir membre du pub de l'autre coin, connaitre les horaires des commerces, savoir que les crumpets sont meilleurs là que là, trainer dans le canapé sans fermer les volets voir et être vus par ceux qui passent dans la rue, entendre le rire de ceux qui quittent le pub ou qui y vont et nous regardent en passant, guetter le passage du mailman (woman en l'occurence), rater le jour de ramassage des libellés, n' avoir rien compris à la subtilité des caisses à sortir...


    une pièce, une bière et un feuilleté: le début du Bonheur?

    * in "pulp fiction"

    Chroniques d'Edinburgh #2 (ou plutôt en dehors d'Edinburgh)

    North Berwick
    Après 4 jours de ville non stop, direction la mer. La côte écossaise, les Lothians (prononcer lovians), la mer du Nord, le vent, le sable (jusque dans les sourcils), le grand air, l'esprit balnéaire, le lieu hors saison, le fish and chips graisseux, la vielle en déambulateur qui finit ses frites et son coca et nous explique que le jeune homme là sur la photo c'est son père.
    Et la voilà à nous raconter que c'est lui a ouvert ce lieu,
    Et nous qui mangeons en silence, en l'écoutant poliment,
    Et elle qui nous dit,
    "enjoy your meal",
    "enjoy your stay",
    "enjoy...". 
    Finalement elle part avec son déambulateur quand elle a épuisé la liste des enjoy. J'avais fini par ne plus écouter, et à ne faire que "mhm", ça se prononce pareil dans toute les langues et c'est sans ambiguité.

    Une journée en vadrouille, en conduite à gauche, tout inversé, à se dire attention on se met à gauche en sortant du rond point qu'on a failli prendre à l'envers, à rouler sur des toutes petites routes coincés entre deux murs de pierre, en maudissant à moitié le GPS et en s'inquiétant d'une eventuelle voiture en face.
    Une journée de chapelle extravagante, de visite de distillerie, de dégustation de whisky à jeun à 13h, de marche sur la plage, de course dans un supermarché discount ouvert 24h/24h, 7 jours sur 7, de découverte de baie où des gens font du kyte surf  après 17h dans le froid, où chaque bled a son pub (ce qui est certainement utile après le kyte surf).

    La plage, côté cour
    Le front de mer, face au Nord

    Rien n'arrête le vent

    Face au large




    Fisherman's houses

    Côté ville

    Craindre les hautes marées

    Comme son nom l'indique


    mardi 20 octobre 2015

    Chroniques d'Edinburgh #1


    Une semaine chez les Ecossais, à la Toussaint.
    Certains nous ont dit qu'on était fous. 
    So far so good.
    Beau temps, doux pour la saison, pas une goutte de pluie.

    Et un séjour sur le thème des chroniques d'Edinbourg (44 Scotland Street, l'insoutenable légèreté des scones...) d'Alexander McCall Smith.
    Nous logeons dans New Town à deux rues de Scotland Street. Cumberland Street pour être exacte, là où se trouve le pub préféré de Angus (le peintre qui a le chien qui pue).
    Et le tour des lieux saints, je suis même allée jusqu'à acheter le Scotsman, le journal local dans lequel sont parus un à un, jour après jour, les chapitres qui ont constitué in fine ces livres.

    Cumberland Street
    Le Pub de la rue
    A l'angle de Drummond Place
    En tournant à droite en bas de Scotland Street
    La boulangerie du quartier
    Le café de Big Lou dans le livre

    La galerie de Matthew, dans Dundas Street
    De face
    Mes fils ne comprennent pas qu'on visite une ville d'après un roman, avec des personnages qui n'existent pas. Et pourtant, ils veulent bien aller goûter au Glass and Thompson café, même si le nom est différent de celui du roman.
    Mon iMari est plus pragmatique, du moment que cela lui permet de boire un coup, il est prêt à tout.

    dimanche 27 septembre 2015

    Lectures estivales

    Quand le diable sorti de la salle de bain 
    de Sophie Divry.

    Une pépite. Roman improvisé, interruptif et pas serieux, nous dit on sur la 1ère page.
    Et c’est vrai. 
    C’est un bonbon à savourer qui ne serait pas sucré, une histoire qui n’en est pas une, une madeleine de Proust sans le gâteau… 
    C’est frais, original et l’écriture créative et démonstrative. 
    Un aperçu :
    « il me manquait toujours de mots. Il n’y a pas de mot pour dire « du samedi » par exemple, alors qu’il existe un adjectif pour dire « du dimanche », dominical. Le repas dominical, tout le monde a compris, mais comment dire la piscine du samedi ou la partie de jambe en l’air du samedi ? (…)
    Il n’y a pas d’expression désignant l’occupation qui consiste à discuter entre amis des films qu’on n’a pas vus. Il est temps d’inventer quelque chose pour remplacer l’expression lénifiante « j’ai commandé sur internet ». J’ai besoin d’un verbe pour dire « jouer faux »,il serait associé à l’apprentissage du violon ».

    Je ne résiste pas non plus à vous faire partage sa tactique  pour  avoir la place côté fenêtre dans le train :
    « si par malheur ma place est côté couloir, je m’assois tout près de la fenêtre et je fais semblant de dormir. Lorsque survient le propriétaire en titre je fais semblant de dormir, il y a de grandes chances :
    1°) qu’il ne sache pas discerner  quelle était sa place légitime sur la banquette – c’est la clause dite de l’empoté ;
    2°) qu’il n’ose pas me réveiller – c’est la clause de politesse ;
    3°) qu’il s’aperçoive du subterfuge mais, que par générosité il n’en fasse pas grand cas – c’est la clause du grand seigneur, qui, contrairement aux deux autres vous assure la jouissance définitive de la fenêtre, si long que soit le trajet (cette dernière clause étant souvent concédée aux femmes par les hommes, cela va sans dire)
    Evidemment,, si j’ai une place « fenêtre » et qu’un petit malin me l’a piqué, je le dégage fissa ».

    Et pour ne rien gâcher au plaisir, c’est aux Editions Noir sur Blanc, la collection Notabilia, le livre en soi est un Objet : couverture rouge cornue, papier tout doux et quelques surprises à découvrir à l’interieur…

    A l’origine notre père obscur 

    de Kaoutar Harchi
    Attention, mieux vaut prévenir, ce livre n’est pas une partie de plaisir. C’est de la violence faite aux femmes ou comment en niant ce qu’est une femme on tue la liberté de tous, y compris celle des hommes.
    Divinement écrit, il nous retient le souffle, tend nos muscles, crispe les mâchoires, hurle à l’intérieur, génère des flots d’invectives et des salves de coups de pied, donne envie de partir loin de quitter un monde où des choses pareilles sont possibles et en même temps de les tuer tous.
    « Et je parle, je parle, je luis dis merci de m’avoir préparée avec dureté, avec distance, avec froideur, à ce qui désormais m’attend. Je lui dis merci de m’avoir habitué au manque, à l’insuffisance, à la rareté, mérci, car grâce à elle plus jamais je n’aurai faim, plus jamais je n’aurai soif, plus jamais je ne serai seule. Je lui dis merci pour son amour qui ne m’a jamais comblée, pour sa présence qui ne m’a jamais satisfaite, pour ses baisers qui ne m’ont jamais consolée. Merci de m’avoir appris, en m’aimant de si loin, en m’aimant si peu, en m’aimant si mal, à devenir ma propre mère, à m’aimer moi même ».


    La ballade d’Hester Day 
    de Mercedes Helnwein
    Gentiment déjantée, sans le vouloir, juste pour se sentir vivante, Hester Day semble faire n’importe quoi. Et pourtant, tout est juste, cohérent dans son référentiel à elle. C’est un gentil road movie, comme les Américains savent en faire, avec Happy End garanti. Certainement pas inoubliable, mais revigorant d’optimisme quand parfois on doute de nos semblables.
    « Et je n’ai jamais vraiment cessé de souhaiter que Jack soit éternellement à mes côtés pour me rappeler à quel point les choses euvent être simples. A quel point on s’obstine à emberlificoter nos attentes, dans la vie, de tout un tas de complications inutiles. »
    En bonus, une play list : le titre de chaque chapitre est inspiré d’une chanson dont on nous donne les références. Ca donne ça sous Spotify https://open.spotify.com/user/tom.anna.carter/playlist/1onMOKmrIbt55uGde6ED97



     
    Le cœur du Pélican 
    de Cécile Coulon
    « le monde ne sera jamais assez vaste pour accueillir des hommes comme lui. Le monde ne comprendra jamais que les grands hommes ne sont pas ceux qui gagnent, mais ceux qui n’abandonnent pas quand ils ont perdu».
    Le héros court tout du long. J’ai l’impression de faire mon jogging en lisant une chapitre. C’est bien : je fais du sport depuis mon canapé.

    Un été en Suisse #7 : Botta @Mogno


    Mogno dans le Tessin - Eglise de Mario Botta
    Ce n'est pas une feuille. C'est une église. Au fond d'une vallée. Après plusieurs dizaines de virages serrés. On n'y arrive pas par hasard.
    D'ailleurs, le village avait été détruit par une avalanche dans les années 80 et le hasard en a voulu autrement puisque plusieurs architectes ont reconstruis ici des maisons et des bâtiments publiques en revisitant la forme traditionnelle.
    C'est beau, ça inspire à la méditation, ça relie avec ce qui nous dépasse.
    C'est ce que les gens ont du ressentir dans les premières cathédrales du Moyen Age



     


    samedi 26 septembre 2015

    Un été en Suisse #6 : art encore, sculptures toujours

     

    On trouve encore des gens suffisamment riches, suffisamment intelligents (philanthropes plutôt non?) et ayant du goût pour acheter de l'Art et en faire profiter le peuple,  en plein air : Open Art (c'est plus classe que open bar non?).
    Il s'agit de la Fondation Pierre Giannada à Martigny, c'est en Suisse, près de Genève. Le jardin des sculptures vaut le détour. 
    Le frère, Leonard, celui a crée la fondation après la mort de son frère, a eu plusieurs vies (sachant qu'il est encore vivant, combien peut-il en avoir encore?). 
    Parmi elles, une a été d'être photo jounaliste. Et bien, on se rince l'oeil. 
    Et on visite des endroits improbables dans des temps tout aussi inimaginables  :Moscou pendant la guerre froide, l'Egypte avant le tourisme, la Grèce quand on ne savait pas où c'était, la Bulgarie quand on ne savait pas que ça existait...

    Leonard Gianadda